[Podcast] La data au service du recrutement
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pen Space, le podcast de la communauté RH en Belgique, produit par Références, revient sur les dernières tendances et pratiques du secteur. Chaque mois, il propose une interview avec un spécialiste du monde RH qui livre ses conseils. C’est au tour de Johan Claes, employer branding et sourcing manager à la Stib, de partager ses astuces pour mener à bien sa campagne RH.

Johan Claes – Sourcing & Employer Branding Manager @STIB
L’employer branding sert à positionner l’employeur en ‘top of minds’ des candidats, selon Johan Claes, employer branding et sourcing manager à la Stib. Il s’agit là d’une démarche ambitieuse qui demande de la consistance et de la cohérence, mais qui, surtout évolue avec le temps. « Cela fait dix ans que je suis à la Stib et que je travaille sur l’image employeur », explique le sourcing manager. C’est dire que pour lui, la campagne RH – une campagne de marketing classique qui concerne non pas des produits mais des personnes avec des émotions et un vécu – n’est plus la même qu’à l’époque : « Avant, il y avait trois journaux nationaux et deux régionaux. On plaçait le budget dans un des cinq journaux selon le profil recherché. Aujourd’hui on a une fragmentation des médias et des outils, on travaille avec beaucoup plus de canaux. Cela devient plus compliqué de savoir quel support utiliser, c’est presqu’une expertise en soi. »
Outre cette difficulté, c’est le budget de la campagne qu’il faut savoir gérer. Pour sa part, Johan Claes a bien conscience que l’argent investi n’est pas le sien, il est public. Il fait donc attention et établit des parties de budget selon les ‘worth of spanning’, suit son feeling tout en l’objectivant, s’adapte au montant reçu, analyse les tendances du marché, réalise des prévisions de recrutement pour l’année prochaine, etc. Mais « s’il y a bien une chose à faire pour prévoir son budget, c’est mesurer. Il faut mesurer tout ce qu’on peut mesurer. Ensuite, il faut prendre des décisions là-dessus : prévoir ou confirmer qu’on a fait les bons choix, qu’on a choisi le bon message et la bonne cible. »
Quels outils et quels canaux pour mesurer ?
De manière générale, pour lancer sa campagne d’employer branding annuelle, Johan Claes se base sur ce qui a été réalisé lors des années précédentes et met cela en regard des résultats obtenus avec objectifs définis pour l’année à venir. Tout au long de l’année, cette campagne bénéficie d’un suivi régulier et de feedbacks. Elle est ainsi améliorée, au besoin, notamment lorsque les résultats escomptés ne sont pas atteints. Dans ce cas, d’autres actions sont menées en parallèle afin de compenser le manque de résultats.
Les actions ‘online’ restent les plus privilégiées, dans la mesure où elles permettent une meilleur traçabilité et compréhension des résultats qu’elles génèrent. Un jobinar dédié aux talents IT – profil en pénurie sur le marché de l’emploi – a par exemple été organisé par la Stib en vue de présenter les différents postes en live, avec une séance de questions-réponses. « On a immédiatement vu que les participants étaient sur la même longueur d’onde avec nos employés. De manière générale, nous avons estimé à 37% le taux de sollicitation pour les fonctions vacantes. A la suite de cet événement, nous sommes montés à 94%. Nous avons engagé 5-6 profils IT depuis lors. »
Autre action qui a bien fonctionné avec 2 millions de vues : le lancement de l’application Simbus. « Avec cette application, on peut rouler avec un bus sur les vraies lignes de bus de Bruxelles. On a dépassé 100.000 sessions de jeux, avec un bon ROI pour 30.000 euros d’investissements. Nous continuons d’ailleurs à faire évoluer ce jeu. » La Stib mise aussi sur l’offline : elle a notamment communiqué l’été dernier sur des sachets de pain : en temps de Coronavirus, les gens ont continué à se nourrir et « nous les avons donc sollicités via ce canal. Dans les semaines qui ont suivi cette action, nous avons obtenu le double des visites sur notre site carrière. »
Mais quels outils utiliser pour mesurer le trafic que génère une campagne ? A cet égard, le sourcing manager énonce de nombreux outils mais en pointe deux en particulier : Google Analytics, qui permet « d’aller dans le détail » et Google Data Studio, qui permet de « déterminer quelle campagne fonctionne le mieux ». De quoi générer de la data et en tirer des conclusions. Par ailleurs, pendant un moment à la Stib, tout a été axé sur le site emploi pour faciliter la mesure du trafic tout en faisant le suivi du candidat. Autrement dit, lorsqu’un candidat cliquait sur « je sollicite », il était à la fois renvoyé sur le site de la Stib et intégré en même temps dans un système de ‘daily counting’ qui donnait un tag unique et récupérait les informations du client. « On pouvait voir si on engageait des réactions et pas seulement des visites sur notre site », se souvient Johan Claes. « Mais actuellement nous ne travaillons plus avec cela. »
Ne rien tenir pour acquis
Tester différents outils, être à l’écoute de nouvelles propositions, remettre tout en question, prendre en compte tous les canaux, en chercher de nouveaux -qu’ils soient online ou offline- sont des passages obligés de l’employer branding pour mettre au point sa campagne et toucher le plus de candidats. « Nous continuons à observer, à rester alertes. Nous n’avons pas peur d’essayer et de tester des choses et de reprendre tout à zéro. Par exemple, chez nous, Facebook génère beaucoup de vue et peu de conversion. Les réseaux sociaux en général ne créent pas beaucoup d’engagements. Ce sont des éléments que nous prenons en compte pour repartager notre budget et repenser nos campagnes. »
On le voit, il n’existe pas une méthode miracle pour mener à bien sa campagne d’employer branding et son budget, tout est question d’expérimentation et de bon sens. Toutefois, il n’est pas toujours nécessaire de passer par des outils pour obtenir de la data : l’aspect humain et le métier en lui-même sont aussi générateurs de conversion. « Nous avons fini par aller chercher l’information chez nos employés », indique Johan Claes. Tout un travail sur la ‘persona’ et sur le storytelling est réalisé : « Le chauffeur de bus est un profil très ouvert, il y a une grosse quantité de candidats à gérer… Pour mieux cibler nos candidats, nous avons décidé de rencontrer nos employés pour en savoir plus. Ils ont une autre vision du métier que nous. Au fond, ce sont les mieux placés pour parler de leur métier. » Il faut penser sa marque employeur différemment : « Il faut toujours essayer de se mettre à la place de la cible, faire preuve d’empathie voir si elle se sent touchée. » En fait, selon Johan Claes, « chaque employé est un employer brander. »
L’employer branding, une jeune discipline
La notion d’employer branding en soi n’existe pas depuis longtemps en Belgique, Johan Claes faisant partie de la génération qui a créé l’employer branding. « Dans les années 2000, nous avons constaté que la demande sur le marché de l’emploi dépendait d’une évolution démographique, la population vieillissait. Nous avons donc changé notre message. Nous avons commencé à travailler sur une image employeur forte et nous continuons encore à travailler dessus bien que le marché évolue. » Pour l’employer branding manager, le vieillissement de la population implique qu’il y a une pénurie systémique qui se met en place sur certains profils. Il n’y a pas assez de jeunes candidats qui arrivent sur le marché chaque année et il est donc nécessaire de travailler en continu son image employeur pour s’assurer que ces rares talents viennent dans son entreprise.
Toutes les sociétés devraient-elles faire de l’employer branding ? La réponse est oui, du moins, pour toutes celles qui sont à la recherche de candidats. « Le marché de l’emploi est 100% concurrentiel et il ne faut pas l’oublier. Si on recherche activement de nouveaux collègues il faut passer par l’employer branding pour faire un placement d’image dans le marché et ainsi trouver les talents adéquats », conclut Johan Claes.
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